Cet article est une lettre ouverte à Christophe Bier.
Suivez les liens qui suivent pour comprendre le contexte.

Pour le contexte lisez donc ceci :

  1. la conférence TEDx de Ran Gavrieli
  2. sa traduction sous forme d’une tribune dans Libé
  3. les extraits d’un droit de réponse de Christophe Bier, critique de ciné et historien du porno – page malheureusement supprimée depuis (2018)


Cher Monsieur,

Je ne vous connais pas mais votre droit de réponse dont des passages sont publiés par Ovidie sur Metronews, me fait, moi aussi, réagir.  Permettez-moi ces quelques commentaires, moi, monsieur-tout-le-monde.

Le fruit de sa réflexion

D’abord, Ran Gavrieli, l’intervenant à la conférence TED, n’a pas pour objectif que les gens arrêtent la pornographie. Cet homme explique son expérience personnelle comme on a dû le lui demander. Les conférences TED sont en cela intéressantes qu’elles explorent des sujets très variés, expliqués par des conférenciers très variés. Expliquer pourquoi et comment on a arrêté le porno n’est pas une chose facile. Ça ne court pas les rues les gens qui l’ont fait et qui sont prêts à en parler.

Le contexte

Je voudrais aussi vous expliquer ce que j’ai compris du contexte de cette tribune : ce n’est ni plus ni moins qu’une traduction de sa conférence TEDXJaffa donnée il y a plus d’un an autour du thème “Le corps”.

Son point d’exclamation (comme vous le soulignez) correspond à une intonation. Il est là pour rendre compte de son enthousiasme lorsqu’il évoque la liberté sexuelle. Ran Gavrieli n’a sans doute pas envie d’être mis tout de suite dans une catégorie “Réac” ou “Puritain”. On aime tellement mettre les autres dans des cases (celles-ci ou d’autres).

Quel diplôme faut-il pour parler de ça ?

Vous dites : “Tout le monde semble s’accorder le droit et les connaissances suffisantes pour parler de la pornographie”.

De près ou de loin, tout le monde à son mot à dire sur le sujet. Que ça plaise ou non. La question n’est pas de savoir “si” on sera un jour confronté au porno mais plutôt “quand”.

Ce gars étudie le genre, il travaille aussi avec des victimes du trafic d’êtres humains. Est-ce pour cela qu’il n’a pas droit au chapitre ?

Il existe des études et de la littérature sur le sujet

Certes. Mais est-ce pour autant que l’on n’a pas le droit de dire qu’on pense que la pornographie n’est pas une bonne chose. Qu’on n’a pas la légitimité pour raconter ce qu’on a vécu ? Ce qui nous a amené à penser ce qu’on pense et à savoir ce qu’on sait.

Il existe aussi des études sur l’héroïne, l’agriculture, l’obésité, les oiseaux, le suicide. So what ?

“La” pornographie n’existe pas

Vous écrivez aussi : “Au passage, jusqu’à présent, et je m’en excuse, je n’ai moi-même cessé d’user de cette facilité : “le” porno. Mais “le” porno n’existe pas plus que “la” comédie, “le” fantastique, “le” polar, “le” film d’auteur.”

Ah ?

Bon. Dans ce cas, “l’”économie n’existe pas, “la” physique non plus, “la” mathématique non plus (ah oui, ça n’existe pas, en vrai), “la” science non plus.

J’ai l’impression que beaucoup de ceux dont le porno est le cœur de métier (indirectement c’est votre cas non ?) se cachent derrière le fait qu’il y a “des” pornographies pour femmes, “des” pornographies douces, “des” pornographies sympa. Ce sont des arbrisseaux qui cachent la forêt.

Liberté de penser

Vous regrettez que Libération se fasse l’écho d’une pareille tribune. La liberté d’expression passe pourtant par l’écoute et la liberté de penser. À chacun de se faire son idée sur la question, sans censurer les différents courants.

Il est grand temps d’arrêter de se moquer de ceux qui veulent arrêter (et qui le plus souvent galèrent affreusement pour s’en sortir) et trouvent que : non, au fond, “les” pornographies c’est pas le pied, c’est pas génial contrairement à ce qu’on entend partout.

La liberté, c’est de pouvoir dire “Non, je ne veux pas de ça, et voilà pourquoi”.