Être homme nu ou femme nue, pourquoi ?
Nu vient du latin nudus « dépouillé de » : l’homme est dans un état de fragilité et d’abandon.
« Le corps n’est pas obscène en soi ; c’est le regard qui le rend tel, dès qu’il le découpe, dès qu’il le fouille à la recherche de son secret, dès qu’il l’étale sur une page, une toile ou une pellicule, pour l’offrir comme proie aux consommateurs. » (M. Marzano, la Pornographie ou l’Épuisement du Désir, p.95)
Qu’est-ce que c’est la pudeur ?
C’est la disposition, la propension à se retenir de montrer, d’observer, de faire état de certaines parties de son corps, principalement celles de nature sexuelle, ou de montrer, d’observer, de faire état de choses considérées comme étant plus ou moins directement d’ordre sexuel (CNRTL). Le mot pudeur vient de latin pudor (« sentiment de honte, réserve, modestie, timidité »). Je retiendrai surtout les racines réserve et modestie. Être pudique, c’est ne pas montrer – et ne pas observer – sans réserve des parties intimes et personnelles.
Pourquoi peindre le nu ?
Parce que c’est beau, parce que ça éveille le désir. La représentation de nus est une façon pour les auteurs de traiter la représentation de la figure humaine. Au Moyen-Âge, c’était un rappel de la condition mortelle et imparfaite de l’homme, et un interdit après le péché originel. À la renaissance c’était une éthique humaniste et un esthétique nouvelle. Le nu a toujours été pour les artistes une forte source d’inspiration. Comme le disait Paul Valéry, le nu artistique est aux artistes de la forme ce que l’amour est aux poètes. Les canons de la beauté ont évolué en même temps que les représentations des nus.
Le nu obscène qu’est-ce que c’est ?
Il suffit d’aller se promener dans un musée d’art de la renaissance pour constater une vrai différence entre l’art et l’obscène. Rubens, Manet, Ingre David, Botticelli, Courbet, Michel-Ange, rien à voir avec Dorcel… Le nu obscène ne supporte pas l’attente, la suggestion. Le nu obscène est soit parfait, lisse et sans faille. Soit extrême, avilissant. Le nu lisse et sans faille ne montre aucune vulnérabilité. Le nu extrême et efface les limites du sujet (qui n’en est plus un d’ailleurs, il devient un objet). La pornographie est un exemple de nudité extrême combinée avec la nudité parfaite.
C’est une succession d’actes répétitifs et identiques sans vie avant ni après l’acte. L’altérité des partenaires est gommée.
Le nu artistique
Le nu artistique laisse planer l’inconnu, appelle à la découverte. Il peut être érotique mais non pas toujours. Finalement, tout est question de subjectivité. Prenez par exemple le magnifique tableau de Gustav Klimt : « le Baiser ». Cette œuvre est érotique selon ma sensibilité, mais ne présente aucun nu.
Le nu artistique n’est pas un objet de consommation. Il permet d’appréhender mais pas de découvrir, pas de connaître.
Un exemple concret : la Grande Odalisque
Prenons ce tableau de Ingres : La Grande Odalisque. Cette femme fait partie d’un harem. Elle est dépeinte digne, paisible. On ne voit aucune partie de manière nette et totalement découverte. Sa main tient un éventail et un pan du tissu. Comme pour se cacher le bas. Son regard est clair.
Cette femme est au repos. Ce tableau est très sensuel, la texture de la peau est belle, le tout d’une grande beauté. Tout est dans suggestions, les détails, le beau.